L'intelligence artificielle s'invite sur les routes françaises pour traquer les infractions. Les radars automatiques vont franchir un cap technologique majeur dès 2026 avec des fonctionnalités qui vont bien au-delà du simple contrôle de vitesse. Le non-respect des distances de sécurité, l'utilisation du téléphone en main au volant et le non-port de la ceinture seront désormais détectés automatiquement. Une révolution qui s'inscrit dans le projet de loi de finances 2025, avec une enveloppe de 46,3 millions d'euros dédiée à la modernisation du parc de radars. Si le nombre total de boîtiers devrait passer de 4 000 à 4 160 unités, c'est surtout leur capacité de détection qui va exploser.
Fini le temps où ces infractions passaient entre les mailles du filet. Grâce à une technologie de pointe combinant vidéo haute définition et intelligence artificielle, les radars pourront identifier simultanément plusieurs manquements au code de la route. Florence Guillaume, déléguée interministérielle à la sécurité routière, explique dans un mémo publié à Bercy que cette évolution sera rendue possible par "l'appropriation de technologie ou de techniques innovantes, comme l'extension de l'usage de l'intelligence artificielle pour améliorer les performances du contrôle automatisé". Concrètement, l'IA analysera les images captées pour repérer un conducteur tenant son smartphone, vérifier le port de la ceinture ou mesurer la distance entre deux véhicules en mouvement.
Avant l'arrivée de ces radars intelligents, plusieurs types d'équipements sont déjà déployés sur le territoire français. Les radars fixes, installés de manière permanente sur des poteaux ou dans des cabines, surveillent principalement les axes routiers à fort trafic. Ces dispositifs contrôlent uniquement la vitesse et certains modèles sont bidirectionnels, capables de flasher les véhicules dans les deux sens de circulation. On retrouve également les radars mobiles, installés dans des voitures banalisées en mouvement ou à l'arrêt, qui contrôlent la vitesse sans flash visible.
Les radars tourelles, surnommés Mesta Fusion 2, représentent une génération plus récente. Ces équipements de grande taille, installés sur des mâts, utilisent une technologie infrarouge imperceptible à l'œil nu pour photographier les véhicules en infraction. Ils possèdent théoriquement des capacités étendues mais se limitent pour l'instant aux contrôles de vitesse, au respect des feux rouges et des passages à niveau. Cette reprogrammation prévue en 2026 va justement transformer plusieurs centaines de ces boîtiers existants en véritables yeux électroniques capables de détecter bien plus d'infractions. Le parc de radars tourelles devrait même passer de 600 à 1 700 unités d'ici 2028.
Les fabricants ont présenté ces équipements révolutionnaires en novembre 2024 lors du Salon des maires et à Milipol, l'événement mondial de la sûreté et de la sécurité intérieure. Ces radars de nouvelle génération s'appuient sur une précision d'image nettement supérieure aux modèles actuels. Le radar tourelle Mesta Fusion 2 dispose notamment d'un capteur optique de 36 mégapixels et d'une antenne radar Doppler multi-cible avec faisceau 3D pour mesurer les distances et suivre les trajectoires, comme l'explique L'Argus dans son enquête.
L'intelligence artificielle couplée à la vidéo permet d'analyser en temps réel le comportement des automobilistes et de détecter plusieurs infractions simultanément. On peut même être flashé pour un excès de vitesse ET pour l'utilisation du téléphone au volant lors d'un même passage devant le radar. Le Département du contrôle automatisé (DCA) a lancé un appel d'offres pour collaborer avec des entreprises capables de gérer ces radars nouvelle génération. Les algorithmes analysent les images en continu et comparent les comportements détectés à des modèles prédéfinis, ne transmettant que les clichés dépassant un seuil de confiance prédéterminé au Centre automatisé de constatation des infractions routières.
Le budget prévu permettra aussi d'acquérir de nouveaux véhicules pour les radars mobiles, d'entretenir le parc existant et surtout de maintenir en état de marche les équipements les plus vandalisés. Un investissement conséquent qui témoigne de la volonté du gouvernement de renforcer la surveillance routière automatisée.
Si vous êtes pris en flagrant délit par ces dispositifs, préparez-vous à payer. Chacune de ces infractions vous coûtera 135 euros d'amende et entraînera un retrait de 3 points sur votre permis de conduire, exactement comme lors d'un contrôle classique par les forces de l'ordre. Le non-respect de la distance de sécurité entre véhicules, également appelé inter-distance, sera particulièrement surveillé sur les autoroutes où les conducteurs ont tendance à coller le véhicule qui les précède.
Mais attention, les sanctions peuvent se cumuler. Comme le souligne Maître Jean-Baptiste Losca, avocat en droit routier, un conducteur peut perdre jusqu'à 8 points et payer 405 euros pour un seul passage devant une tourelle s'il cumule les trois infractions. "On ne peut pas repasser plus de huit points en même temps", précise l'avocat qui estime que "les personnes concernées seront nombreuses". Pour un jeune conducteur avec seulement 6 points en période probatoire, deux infractions simultanées suffisent déjà à perdre le permis. En ville, en plein bouchon, la détection sera évidemment plus complexe.
La question reste posée : ces radars arriveront-ils vraiment à se déclencher de façon fiable pour détecter un conducteur sans ceinture ou tenant son téléphone ? Des tests réalisés au Royaume-Uni depuis 2023 ont montré l'efficacité du système. Sur une route de Cornouailles, le dispositif avait relevé plus de 300 infractions en 72 heures, dont 117 pour l'utilisation du téléphone au volant. Selon le gouvernement, l'IA devrait permettre d'améliorer significativement le taux de transformation des flashs en avis de contravention effectifs.
Le calendrier dépendra des fabricants et de l'avancement de l'homologation de ces nouvelles fonctionnalités. La Sécurité routière prévoit de commencer le déploiement dès 2026, avec une montée en puissance progressive jusqu'en 2030. Au vu du budget souhaité concernant ces nouveaux radars, un marché public devrait être lancé rapidement pour tenir les délais. Les premiers PV pourraient tomber dès le courant de l'année 2026, même si la généralisation prendra plusieurs mois.
Parmi les innovations prévues, les radars multitronçons mesureront la vitesse moyenne des véhicules sur des distances plus longues et sur divers types de routes. Les radars discriminants évolueront avec un système double-face ETD2F, intégrant un lidar 3D pour évaluer la distance entre les véhicules. Les radars urbains subiront eux aussi des évolutions "itératives, incrémentales et agiles" pour couvrir de nouvelles fonctions comme le non-respect des couloirs à bus ou l'encombrement d'un carrefour.
Autre changement prévu : l'État envisage de réintroduire des flashs lumineux visibles sur une partie des radars qui utilisent actuellement la technologie infrarouge. Depuis 2019, environ un quart des radars français, notamment les Mesta Fusion 2 ou radars tourelles, flashent de manière invisible à l'œil nu. Cette discrétion pourrait bientôt prendre fin pour certains équipements. Un retour aux sources qui ne manquera pas de réveiller les réflexes des automobilistes habitués à ce signal lumineux caractéristique.
Bref, la vigilance sera de mise sur les routes françaises en 2026. Ces radars intelligents marquent une nouvelle étape dans la sécurité routière, avec une capacité de détection décuplée qui laisse peu de place à l'erreur. Pour éviter les mauvaises surprises, une seule solution : respecter scrupuleusement le code de la route, raccrocher son téléphone, boucler sa ceinture et maintenir une distance raisonnable avec le véhicule qui vous précède. Vous pouvez retrouver toutes les informations officielles sur la sécurité routière sur le site de la Sécurité Routière.
Âge recommandé
Tout public















