Néant de Dave St Pierre au Tarmac : critique d'un pari réussi

Par · Publié le 13 octobre 2017 à 11h33
Il y a quelques années, le Théâtre de la Ville présentait de Dave St Pierre trois spectacles : "Foudres", "Un peu de tendresse bordel de merde" et "La pornographie des âmes", un évènement que le tout Paris s'était empressé de découvrir. En cette rentrée, le Tarmac programme le tout nouveau projet du chorégraphe québécois déjanté, Néant, son premier solo. Un pari hautement réussi.

Une perruque blonde s'agite dans le hall du Tarmac, le même genre que celles qu'abordait la horde d'hommes nus qui sautait sur le public dans Un peu de tendresse bordel de merde !. Le spectacle n'a pas encore commencé, et pourtant. Dave St-Pierre, nu sous un épais sac de chantier transparent, interpèle les spectateurs et se plaint, comme si de rien était, de l'attente qu'il considère trop longue. Une fois les portes ouvertes, il se demande, tout haut et très fort, du retard de la pièce alors qu'il est lui-même assis dans les gradins. "Mais que fait Dave St Pierre ?" se demande-t-il. Bonne question. Il finit par se glisser sur le plateau et le show, officiellement, peut commencer. 

Sans sortir de son personnage, voix fluette et perruque blonde, le chorégraphe s'interroge sur le fond et la forme de la danse contemporaine. Ses propos sont d'un cynisme fou et il tourne en dérision la scène contemporaine sans toutefois s'en épargner aucunement. Au programme, des imitations, très drôles, de Pina Bausch, d'Olivier Dubois, de Jan Fabre et du fameux The artist is present de Marina Abramovic (l'artiste passait des heures entières assisses, immobiles, à entrer en contact visuel avec des inconnus). Camouflé derrière un sacré niveau d'humour et d'auto-flagellation, Dave St Pierre n'épargne personne et libre à nous de nous poser effectivement la question : où se trouve réellement l'art dans ce que nous sommes entrain de voir ? Inutile de préciser que Dave St Pierre prend le risque de perdre totalement le public en face de lui en partant du principe qu'il comprendra toutes ses références. En dénonçant le snobisme de l'art, il y contribue grandement (en en ayant parfaitement conscience).

Puis, finalement, Dave St Pierre retire sa perruque. Tout à coup, il quitte son costume de sale gosse et (re)devient danseur, chorégraphe et un homme fragile. Il (re)devient l'homme qui ne se cache plus derrière un costume (sic) pour être ce qu'il est vraiment. Son corps aussi se transforme. Aidé à la vidéo par Alex Huot, au son par Stéfan Boucher et à la lumière par Hubert Leduc-Villeneuve, Dave St Pierre place la barre très haute : quand il se prend au sérieux, oui, il est a couper le souffle, il invente des mondes, nous transporte dans une autre dimension. Son corps est tour à tour monstrueux, animal, effrayant. Les scènes sont fortes, puissantes, percutantes. Mais la plus grande force de ce spectacle reste, sans aucun doute, sa manière qu'il a de souffler, en remettant sa perruque après un moment bouleversant et de s'écrier : "Mais qu'est ce que c'était long !". C'était long, mais qu'est ce que c'était bon !

nformations pratiques :

Néant 
Au Tarmac
Du 11 au 14 octobre 2017
Réservations en ligne à partir de 27,50 euros

 

 

Informations pratiques

Dates et Horaires
Du 13 octobre 2017 au 14 octobre 2017

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    Lieu

    33, Rue de Lyon
    75012 Paris 12

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