Covid : le vaccin évite-t-il une transmission du virus, une fois le produit administré ?

Par Laurent de Sortiraparis · Publié le 6 janvier 2021 à 19h22
Les vaccins contre la Covid sur le marché ou en cours de validation protègent, selon les données déjà dévoilées, d'une contamination, mais évitent-ils la transmission du virus à d'autres personnes ? On tente de vous apporter une réponse.

Dans quelles mesures les vaccins contre la Covid sur le marché ou encore à l'étude protègent-ils de la maladie ? Une question qui taraude de nombreuses personnes, pas tant sur son efficacité à combattre les symptômes (les données sont largement suffisantes pour le montrer), mais plutôt sur sa capacité à éviter la transmission du virus une fois le vaccin inoculé.

Le vaccin évite-t-il donc les contaminations ? Les scientifiques l'espèrent, mais pour le moment, les données sur le sujet sont insuffisantes. La raison ? Les chercheurs ont préféré se concentrer, comme nous le rappellent nos confrères du Monde, sur les symptômes, plus facilement repérables lors de la mise en route des essais cliniques, mais également moins chers à étudier, contrairement à la réalisation de tests virologiques hebdomadaires qui, eux, permettent de voir si le virus continue de se transmettre une fois vacciné.

"Surtout, sur le plan de la santé publique, ce sont bien les malades qui posent un problème, notamment ceux qui développent des formes graves. Si le Covid-19 se contentait de nous infecter comme un rhume banal, on n’aurait pas besoin d’un vaccin", explique ainsi Guy Gorochov, responsable du centre d’immunologie et des maladies infectieuses à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Une direction toute logique, donc, pour venir à bout de la maladie et éviter l'hécatombe.

Une protection contre la Covid déterminante dans la stratégie vaccinale

Une question sur la protection des autres qui se pose, à l'heure où les vaccinations ont commencé, et qui pourrait changer du tout au tout les stratégies vaccinales mises en place aux quatre coins du globe. Pour exemple, toujours selon nos confrères du Monde, "si un vaccin fait véritablement barrière au virus, il peut paraître prioritaire d’immuniser les supercontaminateurs potentiels, ceux qui rencontrent beaucoup de monde – médecins, chauffeurs de bus, caissières de supermarché". À contrario, si ce vaccin ne permet de contrer que les symptômes et l'aggravation des cas, la priorité vaccinale change, s'orientant vers ce que tend à faire le gouvernement en ce qui concerne la campagne française de vaccination.

Un changement de stratégie qui "Si nous obtenions de nouvelles données", pourrait "faire évoluer nos priorités", indiquait au Monde Daniel Floret, vice-président de la commission technique de vaccination de la Haute autorité de Santé. Quoiqu'il en soit, plusieurs études sont en cours pour déterminer si la transmission reste possible - ou au moins amoindrie - une fois vacciné : en atteste un essai de Moderna Therapeutics, mené sur des singes et consistant en l'analyse d'écouvillons nasaux (tests PCR) après injection d'une dose de vaccin. Une étude aux résultats prometteurs, puisqu'au bout de deux jours, le virus avait quasiment disparu des échantillons, même après exposition à la Covid.

Des données encore insuffisantes

Des résultats qu'il faut tout de même prendre avec des pincettes : "Les singes pèsent 8 kg, dix fois moins que nous. Or, quand on leur a donné 10 microgrammes de produit, ce qui en proportion correspond au vaccin Moderna pour les humains, cela n’a pas eu beaucoup plus d’effet que le sérum physiologique de contrôle…", indique ainsi Jean-Daniel Lelièvre directeur du service d’immunologie clinique et de maladies infectieuses à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil.

L'expérience a été réitérée depuis, lors de la phase 3 de l'essai clinique ayant conduit à l'élaboration du vaccin, sur 28 000 volontaires - humains cette fois-ci - avant administration du vaccin. Les résultats sont ici plus mitigés : parmi les personnes négatives au test PCR avant vaccination, 52 ont ensuite été testées positives et asymptomatiques un mois plus tard. Concernant ces 52 personnes positives, 14 avaient bien reçu le vaccin, et 38 un placebo.

"Insuffisant pour conclure, mais cela suggère un certain degré de protection", a ainsi expliqué les chercheurs de l'essai dans la revue New England Journal of Medecine, le 30 décembre dernier. "Les échantillons sont trop faibles et les marges d’erreur très importantes", avait conclu de son côté Jean-Daniel Lelièvre. La question reste donc en suspens pour le moment.

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