Francois ozon

Par · Publié le 28 avril 2008 à 1h40
A l’occasion de la sortie de son nouveau film Angel, François Ozon nous gratifie de quelques mots. Un film d’époque qui tend sur le mélodramatique et en anglais de surcroît. Le réalisateur nous explique pourquoi il a choisi cette histoire tirée d’un roman d’Elisabeth Taylor et comment il y a apporté sa patte. Rencontre avec un homme posé, technique et un peu rêveur
Comment avez-vous abordé le travail d'adaptation d'Elisabeth Taylor ?
Déjà, je pense que l'on adapte un bouquin, il faut accepter de le trahir : il y a autant de visions du livre que de lecteurs. Le gros travail que j'ai fait, c'est faire en sorte que la première partie du film corresponde vraiment au livre ; La seconde est un peu plus différente dans le sens ou Angel n'était pas vraiment confrontée à la réalité, elle restait enfermée dans son château et mourait petit a petit. Il me semblait qu'à un moment, il fallait qu'il y ait un choc psychologique, d'où cette lettre, d'où cette confrontation avec Angelica, la petite fille dont elle à rêvé quand elle était enfant et c'était une manière, à mon avis, de rendre le personnage plus émouvant et plus victime d'elle-même.

Des studios Américains vous ont proposés de monter le film avec eux, et vous avez refusé faute de pouvoir faire une fin qui vous convienne...
C'est-à-dire que pour les Américains, comme Swimming Pool a très très bien marché en Angleterre, ils étaient intéressés par le fait que je refasse un film en anglais. Ils avaient envie que je prenne une star pour jouer le rôle principal, que je travail pendant un an, mais vu que je n'ai pas Final Cut, j'ai vite compris que je n'allais pas être libre de ce que je voulais faire. J'ai donc préféré faire le film selon mes conditions, avec une production Française et en Europe. Le problème lorsque l'on travail aux USA, c'est que l'on dépend de trop de paramètres que l'on ne peut pas contrôler.

Pourquoi l'Angleterre particulièrement ?
L'Angleterre parce que l'histoire est particulièrement britannique, ça correspond vraiment à la tradition littéraire anglaise et donc je n'avais pas l'impression qu'en France l'histoire aurait pu marcher.
La nécessité de prendre des acteurs anglais s'est donc imposée d'elle-même ?
Oui, à partir du moment où l'on tourne en Angleterre c'était plus pratique avec des anglais. Qui plus est, les acteurs anglais ont un niveau incroyable, ils ont une tradition théâtrale qui permet de vraiment se reposer sur eux. Je ne parle pas couramment anglais, et le fait qu'ils aient travaillé, qu'ils aient une formation, qu'ils connaissent déjà le scénario intégralement, qu'ils aient réfléchi, qu'on ait beaucoup discuté avant, a permis lorsque nous sommes arrivés sur le plateau, d'avoir quelque chose de solide, ils étaient déjà prêt.

Par rapport au casting, Charlotte Rampling vous a-t-elle aidé, influencé ? Pourquoi elle ?
Non. Avec Charlotte, c'est notre troisième film. J'ai pensé au rôle d'Hermione, la femme de l'éditeur, qui observe, et dont le point de vu change pendant le film. Au début, elle est là, à juger le personnage, et petit à petit son regard se modifie, finalement elle le comprend un peu. Je pense qu'elle suit le point de vue du spectateur dont le regard évolue aussi. Charlotte c'était important de l'avoir comme une sorte de mascotte, elle avait déjà participé à deux de mes films, et celui la, comme il était intégralement en anglais, j'avais simplement envie qu'elle soit là.

Les deux principaux personnages Esme et Angel ratent leur vie, l'un ne croyant pas du tout en lui et l'autre ne croyant qu'en elle. Où vous placez-vous personnellement par rapport à ça ?
Je pense que ce film est une forme d'exorcisme, presque thérapeutique.
Je me dis, voila je n'ai pas envie de finir ni comme l'un, ni comme l'autre. Je fais le portrait de deux artistes qui passent effectivement à côté de leur vie, et qui ratent tous les deux leur relation à leur propre vie, et à leur art. Je pense qu'Angel est complètement enfermée dans son imaginaire, et qu'elle n'est pas prête à ouvrir les yeux et à se confronter à la réalité, c'est d'ailleurs ça qui la tue. Elle rêve d'un château, elle réussi à l'avoir et ce château devient son tombeau. Esme est quelqu'un qui n'a aucune confiance mais qui en même temps est en avance sur son temps, il fait une peinture que les gens ne sont pas capables d'apprécier. Mais peut être qu'après la guerre et toutes ses horreurs, avec toute la souffrance que les gens vont subir, ils vont regarder ses peintures différemment et peut-être mieux comprendre ce qu'il voulait faire. Ce coté un peu ironique, montrer cet artiste qui n'a pas été reconnu de son vivant, et qui peut-être va avoir une postérité, un peu comme Van Gogh m'intéressait beaucoup.

Il y a un troisième personnage qui a une facette un peu intéressante, Nora. Cette relation entre elle et Angel tient-elle de l'homosexualité, de l'amour, de la névrose ?
Je pense qu'il y a un vrai rapport amoureux, mais qu'à l'époque, c'est une chose qui ne s'assumait pas forcément. La vraie relation amoureuse du film est celle la, plutôt que celle d'Angel et Isme, cette dernière s'étant construite sur un malentendu.

Qu'est ce qui vous a convaincu chez Romola Garai (le rôle principal) ?
J'ai trouvé qu'elle avait une multitude de facettes et qu'elle n'avait peur de rien. C'est important car le personnage d'Angel est assez extravagant et il fallait pouvoir la défendre et l'aimer. Romola l'a aimé directement, elle a compris que c'était une actrice, que c'était quelqu'un qui jouait sa vie plus qu'elle ne la vivait et du coup elle s'est lancée corps et âme dans le rôle.

Votre relation avec elle pourrait elle perdurer comme avec Charlotte Rampling ?
Peut être, je suis très attaché a l'Angleterre et aux acteurs anglais. Tout dépendra des sujets.

Quittons l'Angleterre pour revenir à Paris. Vous êtes né et vivez à Paris ? En sera-t-il toujours ainsi ?
Oui je suis né à Paris et y vit encore. En ce moment, je suis dans une période ou j'en ai un peu marre de Paris, ou je me dis que ça me ferait du bien d'aller voir ailleurs. L'idée de la campagne me plait en soi, mais j'ai très peur de revenir au bout d'une semaine, de ne pas être capable d'y vivre. Lorsqu'on est un vrai parisien, il est très dur d'en partir ; mais j'aimerai bien partir pour une grande ville, une autre capitale : New York ou Berlin.



Vous n'aimez pas être filmé, c'est important pour vous cette liberté dans Paris, de pouvoir circuler comme tout le monde ?
Oui, c'est bien d'avoir un cer
tain anonymat, si je suis réalisateur, c'est pour être derrière la camera, pas devant. Je n'ai pas envie d'être reconnu, j'ai besoin de garder cet anonymat.

Portrait Parisien :

Si vous étiez...
une rue de Paris ?
Aï, c'est dur de choisir, Paris est tellement multipleUne place plutôt Place de la République.

un arrondissement ?
le 1er arrondissement.

une station de métro ?
Une station que j'aime beaucoup Dans le 19émeSur le métro aérien La Chapelle je crois, avec ses vitraux.

Quelle a été votre dernière sortie ?
Je n'ai pas beaucoup de vie culturelle (rire) L'exposition de David Lynch à la Fondation
Propos recueillis par Manu Louit.





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