IKKS en redressement judiciaire : de nombreux emplois menacés en Ile-de-France

Par My de Sortiraparis · Mis à jour le 8 octobre 2025 à 12h12 · Publié le 8 octobre 2025 à 11h57
La marque de prêt-à-porter IKKS a été placée en redressement judiciaire le 2 octobre 2025 par le tribunal des activités économiques de Paris. Cette procédure menace plus de 1 000 emplois et ouvre une période d'observation jusqu'en avril 2026 pour l'enseigne française fondée en 1987.

Les enseigne de prêt à porter n'ont pas fini d'être dans la tourmente. Alors que la marque Shein enfonce le clou en ouvrant des boutiques permanentes dans Paris, la marque de prêt-à-porter IKKS vient de subir un nouveau coup dur qui pourrait lui être fatal. Le tribunal des activités économiques de Paris a placé l'enseigne en redressement judiciaire le 2 octobre dernier, moins de deux ans après un important plan social qui avait déjà conduit à la fermeture de 77 magasins et à la suppression de plus de 200 postes.

 

Cette décision, qui concerne les activités du groupe en France, fait planer une lourde menace sur plus de 1 000 emplois et ouvre une période d'observation qui s'étendra jusqu'en avril 2026. Basée à Saint-Macaire-en-Mauges dans le Maine-et-Loire avec des bureaux dans le Marais à Paris, l'enseigne à l'ADN rock cherche désormais activement un repreneur pour assurer sa survie.

La situation d'IKKS illustre la crise profonde que traverse le secteur du prêt-à-porter en France. En cessation de paiements depuis mi-septembre, le groupe rejoint une longue liste de marques emblématiques des centres-villes frappées de plein fouet par une succession de difficultés. Après la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine, l'inflation galopante, la hausse des coûts de l'énergie et des matières premières, c'est désormais la concurrence féroce de l'ultra fast fashion incarnée par des géants comme Shein qui achève de fragiliser ces enseignes traditionnelles. Pour IKKS, la guerre en Ukraine a eu un impact particulièrement dévastateur puisque le pays représentait 13% des approvisionnements de la marque et constituait un marché important où elle était implantée depuis plus de 25 ans.

L'hécatombe dans le secteur ne cesse de s'aggraver. Depuis 2022 et la liquidation retentissante de Camaïeu qui avait laissé 2 100 salariés sur le carreau, les défaillances se multiplient à un rythme alarmant. En avril 2025, Jennyfer a été placée en liquidation judiciaire, entraînant la fermeture de 191 magasins et la suppression de 999 emplois. Quelques semaines plus tôt, Kaporal mettait la clé sous la porte avec 51 magasins fermés et 280 licenciements. La liste s'allonge avec Burton of London, San Marina, André, Minelli, Pimkie ou encore Kookaï. Même les enseignes pour enfants n'échappent pas à la tourmente : Okaïdi a fermé plusieurs magasins en début d'année, tandis que Sergent Major et Du Pareil Au Même multiplient les difficultés. En juillet 2025, Princesse tam.tam et Comptoir des Cotonniers ont également été placés en redressement judiciaire, rejoignant Naf Naf dans son troisième redressement en cinq ans. Selon la CGT, le secteur de l'habillement a perdu plus de 37 000 emplois sur 10 ans, avec 4 000 suppressions de postes rien qu'en 2023. Face à cette vague déferlante, même C&A a annoncé la fermeture de 24 magasins en France d'ici 2026, accompagnée de 93 licenciements économiques.

Pourtant, la direction avait tout tenté pour redresser la barre. En début d'année 2024, elle avait lancé le plan PhoenIKKS, un projet ambitieux visant à recentrer l'activité sur les segments les plus rentables et à rationaliser le réseau de distribution. Ce plan de sauvegarde de l'emploi prévoyait initialement la suppression de 202 postes sur 1 328 en France et la fermeture de 77 points de vente sur 604. Au final, 140 emplois avaient été concernés. En juin 2024, un refinancement par les créanciers et une restructuration de la dette avaient également été obtenus, laissant espérer un nouveau départ. Il y a quelques semaines encore, la marque affichait une certaine assurance en présentant sa collection automne-hiver sur un rooftop parisien branché dans le Marais. Mais cette façade n'a pas résisté à la réalité économique.

Quels magasins IKKS sont concernés par la fermeture ?

La procédure de redressement judiciaire concerne l'ensemble des activités d'IKKS en France, y compris les différentes structures du groupe comme IKKS Groupe, One Step et HoldIKKS. Le réseau compte actuellement environ 600 points de vente répartis dans de nombreuses villes françaises, après la fermeture des 77 magasins et corners intervenue suite au plan social de 2024.

En Île-de-France, l'enseigne dispose d'une présence significative avec plusieurs dizaines de boutiques, notamment à Paris dans des quartiers emblématiques comme le Marais où se trouvent les bureaux du groupe, mais aussi Boulevard des Capucines dans le 2e arrondissement, ainsi que dans les principales villes de la région comme Rueil-Malmaison, Levallois-Perret ou encore Boulogne-Billancourt. Pour l'instant, aucune liste précise de nouvelles fermetures n'a été communiquée, mais la situation laisse présager d'autres restructurations dans les mois à venir. En attendant, les magasins restent ouverts et affichent des promotions importantes, tant en boutique physique que sur le site marchand.

Qui sont les propriétaires d'IKKS et que devient la marque ?

Fondé en 1987 par Gérard Le Goff, IKKS a connu plusieurs changements d'actionnaires au fil des ans. Après avoir fait partie du Groupe Zannier pendant plusieurs années, la marque a été cédée en 2015 au fonds White Knight de LBO France. Mais l'entreprise n'arrivait pas à honorer sa dette et a été reprise en 2019 par ses créanciers, les fonds d'investissement américains Avenue Capital, CarVal Investors et Marathon Asset Management. Ces derniers, qui avaient injecté plusieurs dizaines de millions d'euros pour relancer la machine notamment sur le digital, souhaitent aujourd'hui céder leurs participations et recherchent activement des repreneurs. La tâche s'annonce ardue dans un contexte où le secteur du prêt-à-porter accumule les déconvenues, avec des enseignes comme Camaïeu, Naf Naf, San Marina, Kaporal ou encore Princesse tam.tam et Comptoir des Cotonniers également en grande difficulté ou disparues.

Avec ses marques I.Code et One Step, IKKS représente pourtant un acteur historique du prêt-à-porter moyen-haut de gamme en France, employant 1 500 collaborateurs dans le monde. Mais les experts pointent du doigt un modèle économique qui n'a pas su arbitrer entre ses coûts fixes très lourds et sa désirabilité. Comme l'explique Vincent Redrado, fondateur de DNG, la marque possède un réseau trop dense avec plus de 600 points de vente, ce qui génère beaucoup de loyers, de frais de personnel et immobilise énormément de stocks. Cette structure de coûts fixes est devenue trop pesante face à la volatilité de la demande post-Covid, d'autant que le chiffre d'affaires reste majoritairement réalisé en boutique physique. La gouvernance par le biais d'un LBO (Leveraged Buyout), efficace en phase d'expansion, s'avère incompatible lorsqu'une réduction stratégique devient nécessaire.

L'avenir d'IKKS s'écrit désormais sous haute incertitude, même si la marque conserve des atouts indéniables avec son ADN produit et des collections qui s'étaient améliorées ces derniers mois. La période d'observation qui court jusqu'en avril 2026 sera décisive pour déterminer si un repreneur pourra être trouvé et si les 1 000 emplois pourront être sauvés. En attendant, le dossier illustre une nouvelle fois la fragilité du commerce spécialisé français face aux mutations économiques mondiales et à la concurrence du e-commerce et de la fast fashion.

Informations pratiques

Âge recommandé
Tout public

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