Aux Lyonnais, le bouchon lyonnais d'Alain Ducasse à Paris repris avec brio par la fratrie Dumant

Canaille, le bistrot Aux Lyonnais l'est depuis ses premières heures et le restera. Après près de 25 ans passé sous la direction d'Alain Ducasse, ce véritable bouchon lyonnais en plein cœur de Paris change de main. Si le chef multi-étoilé garde un œil bienveillant sur son restaurant chéri, c'est désormais l'inarrêtable fratrie Dumant qui en a repris la gouverne avec brio.

L'histoire débute en octobre 2002, lorsqu'Alain Ducasse tombe sous le charme de Aux Lyonnais, un établissement à deux pas de l’Opéra comique qui fut d'abord un dépôt de charbon, de bois et de vin dès 1890, avant de devenir, au sortir de la seconde Guerre mondiale, un véritable bistrot sous l'impulsion du restaurateur Daniel Violet.

Aujourd'hui classé aux Monuments Historiques, avec sa mythique façade lie de vin en bois et son enseigne "Maison Lyonnaise", aucun doute possible : ici, la cuisine est celle d'un véritable bouchon lyonnais traditionnel. Boiseries et moulures aux motifs floraux, luminaires, photos du siècle dernier et faïences sur les murs, banquettes rouges où se lover et salon privatisable à l'étage entouré de miroirs piqués... Le restaurant Aux Lyonnais plonge le chaland dans la France d'antan, le temps d'un repas.

Mais si la décoration n'a pas bougé d'un iota depuis son ouverture, du côté des propriétaires, il y a du nouveau. Près de 25 ans après la reprise des Lyonnais par Alain Ducasse, le chef étoilé passe le flambeau à la famille Dumant - tout en gardant un œil bienveillant, de loin, sur son établissement chéri dont la réputation n'est plus à faire.

"Pour assurer l’avenir de ce restaurant auquel je suis si attaché, j’ai choisi la famille Dumant parce qu’elle a largement prouvé sa capacité à faire vivre la tradition bistrotière parisienne. Je sais qu’ainsi Aux Lyonnais restera l’adresse emblématique de la cuisine lyonnaise à Paris." détaille le chef Ducasse.

Mais où s'arrêteront donc les Dumant ? Comptant désormais parmi les restaurateurs les plus influents de Paris, les jumeaux Félix et Margot Dumant sont de véritables amoureux de la cuisine bistrotière. Pour s'en rendre compte, il suffit de connaître les faits d'armes de cette famille qui commencent en 1984 lorsque les frères Jérôme et Stéphane Dumant ouvrent le Paris Seize, puis L’Auberge Bressane en 1992 et Les Marches en 2014.

En 2017, c'est au tour des enfants de Jérôme, Margot et Félix, d'ajouter à leur collection Aux Bons Crus, puis d'ouvrir successivement Aux Crus de Bourgogne en 2019 et Le Chardonnay en 2022... sans oublier la reprise de l'institution L'Auberge du Mouton Blanc, cette année-même. Le duo enchaîne les succès mais sans jamais perdre de vue leur objectif : respecter scrupuleusement la personnalité de chaque restaurant, en préserver l'esprit, tout en rendant hommage à la cuisine française traditionnelle.

C'est associés à leur cousin, Kevin Marengo, que Margot et Félix Dumant se lancent dans cette nouvelle aventure, dans le plus grand respect du patrimoine gastronomique de Lyon. D'autant que l'équipe de l'époque Ducasse reste inchangée, avec toujours la cheffe lyonnaise Victoria Boller derrière les fourneaux.

Oubliées, parfois désuètes, ces spécialités lyonnaises retrouvent de leur superbe sous les doigts de la cheffe qui, sans trop les moderniser ni les dénaturer, réussit le pari de les remettre au goût du jour (en les allégeant, en soignant les dressages), mais sans jamais faire une croix sur l'aspect indéniablement réconfortant et généreux de la cuisine de bouchon. Avec un beau travail réalisé sur les sauces (la cuisine lyonnaise est une cuisine bourgeoise qui se sauce jusqu'à la dernière goutte), toutes d'une grande sapidité.

On pense ainsi à la sauce Bonne Femme qui accompagne une truite des Pyrénées (30€) à la cuisson parfaite ; à la sauce Dijonnaise qui recouvre généreusement cette andouillette à la fraise de veau (un choix beaucoup plus fin que l'habituelle viande de porc ; 32€), cuite de telle manière qu'elle arrive sur table snackée et croustillante ; et bien sûr à la sauce Nantua qui escorte l'épatante quenelle de brochet (22€) qu'on a choisi en entrée mais qui, en véritable produit d'appel, provoque chez nous cette sensation de reviens-y qui nous a presque fait regretter de ne pas l'avoir choisie en plat principal.

Si la cervelle de Canut (8€) reste un incontournable pour bien débuter un repas lyonnais (elle est ici acidulée à souhait), l'ile flottante aux pralines roses (14€) semblait être un dessert de choix pour clore ce diner sous les meilleurs auspices. Hélas - ou pas, la cuisine lyonnaise étant aussi une cuisine généreuse, nous n'avions tout bonnement plus de place. Partie remise !

Portée par un service attentionné, inhérent aux adresses des Dumant, l'institution Aux Lyonnais a encore de beaux jours devant elle et s'offre même à toutes les bourses, avec des menus déjeuner à 28€ entrée/plat et 32€ entrée/plat/dessert. Bien plus abordable qu'un aller-retour à Lyon en train !

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